Chedly Ayari : « La dévaluation du dinar reflète la réalité du pays »

Le projet de jumelage entre la Banque centrale de Tunisie et la Banque de France, financé par l’Union européenne à hauteur de 1.113.000 euros, a été clôturé aujourd’hui à Tunis, par la tenue d’un séminaire au sujet d’un cadre politique monétaire axé sur le ciblage de l’inflation. Le gouverneur de la Banque Centrale, Chedly Ayari, a affirmé à ce sujet, que les banques centrales à travers le monde adoptent des politiques diverses, pour réguler le marché financier, et l’économie du pays.

En effet, certaines banques centrales choisissent de veiller sur la stabilité des prix, de l’emploi, et la stabilité financière…alors que d’autres veillent exclusivement à quantifier l’inflation ; leur seul objectif, la stabilité des prix. « D’autres courants plus récents ont annoncé la fin du ciblage de l’inflation, partant du fait que cette politique favorise une prise de risque excessive par les agents économiques en quête de rendement élevé, ce qui était à l’origine du déclenchement de la plus grave crise financière mondiale depuis celle des années trente », a dit le gouverneur de la BCT.

Un autre courant a vu ensuite le jour, prônant l’orientation de la politique monétaire vers le ciblage du PIB nominal. Chedly Ayari a expliqué que si le niveau anticipé du PIB nominal est supérieur au niveau ciblé, la Banque centrale relève ses taux directeurs et réduit la liquidité bancaire à travers des opérations d’open-market.  Si au contraire, il est inférieur au niveau ciblé, elle diminue ses taux directeurs et élargit la liquidité bancaire. Elle crée ainsi en même temps de la croissance et la stabilité des prix.

Selon son gouverneur, la Banque Centrale de Tunisie pourrait adopter à l’avenir le ciblage de l’inflation, telle que la Pologne, dont l’expérience réussit. Il a par ailleurs ajouté que la publication d’un rapport régulier sur la politique monétaire de la BCT, est à l’étude, « en vue de rendre les décisions dans ce domaine plus transparentes et mieux argumentées ».

C’est d’ailleurs dans cette optique qu’a été mis en œuvre le projet de jumelage entre la BCT et la Banque de France qui a été lancé le 28 mai 2011, et auquel a participé la banque centrale de Pologne, dans le but de renforcer les capacités techniques et analytiques des cadres de la Direction générale de la Politique monétaire (DGPM) à la BCT.

Chedly Ayari est revenu lors de la conférence de presse organisée ce jeudi, sur la politique monétaire choisie, en l’occurrence, le ciblage de l’inflation, en expliquant que l’inflation visée dans l’avenir est de 4% : « Notre but est de faire diminuer le taux actuel qui est de 6.4%…nous travaillerons sur un intervalle, entre 4% et 5%, et non pas d’un point fixe …nous sommes dans le combat de l’inflation avec une certaine souplesse, il ne faut pas que la croissance en souffre, car l’inflation il faut en avoir pour que l’économie marche », a-t-il dit.

Concernant la tendance baissière du dinar, le gouverneur de la BCT a affirmé que « cette chute du dinar a commencé en 2000, et s’est accéléré après la révolution…beaucoup de facteurs sont intervenues pour renforcer cette tendance, à savoir la situation économique, pas de croissance et donc pas de demande du dinars, le déficit, l’environnement sécuritaire et politique. Cette dépréciation est le reflet de cette situation là », a-t-il dit. La BCT qui joue le rôle de régulateur sur le marché financier, a été confrontée entre le 6 et 10 mai courant à une demande en devises de 350 millions de dollars de la part d’institutions étatiques qui devaient effectuer des achats (blé, hydrocarbures…).

« Alors que nous disposons de réserves en devises très faibles, et que nos sources sont sèches, nos exportations ne rapportent pas grand-chose, les recettes du tourisme ont baissé, nous gérons cela avec beaucoup de parcimonie. Durant cette période de mai, les enchères ont commencé entre les banques pour vendre des devises, ce qui a crée cette hausse de la valeur de l’euro, qui s’est actuellement stabilisée », a expliqué le gouverneur de la BCT, ajoutant qu’il n’y a pas eu de dévaluation intentionnelle du dinar et qu’il continuera à obéir à la loi du marché.

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